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Du rififi chez les hommes
Du rififi chez les hommes
Tony le Stéphanois, gangster usé, ruiné et fatigué, se lance dans un dernier gros coup. Aidé de trois complices, truands au code d’honneur strict (pas d’armes, pas de sang, pas de trahison) il monte le braquage audacieux d’une joaillerie en plein cœur de Paris. Trahie par une ancienne maîtresse de Tony, la bande devra alors mener de front le cambriolage et un duel meurtrier avec le gang rival des Grutter.
1955. Accusé de sympathies communistes par McCarthy et ses sbires, Jules Dassin trouve refuge en Europe, où les instigateurs de la Liste Noire s’acharnent à le poursuivre, menaçant tout producteur s’aventurant à produire un de ses films d’être interdit de distribution sur le territoire américain. Du Rififi chez les Hommes marque pourtant son retour aux affaires, grâce au courage de producteurs français qui lui donnèrent une seconde chance en lui offrant ce projet sur un plateau.
Dassin rechigna d’abord à se jeter dans l’aventure, échaudé par un script qu’il détestait. Sur le fond, on ne saurait lui donner tort, tant cette histoire de cambriolage semble aux premiers abords d’une banalité consternante. Un vieux gangster à la retraite qui se lance dans son dernier coup, un gang rival de dangereux mafieux gominés, un cambrioleur italien aux doigts de fée (joué d’ailleurs par Dassin lui-même, sous le pseudo de Perlo Vita) : à la lecture du scénario, les clichés s’enfilent comme des perles. Sans parler d’un des problèmes évidents du film aujourd’hui : une misogynie assumée (le numéro de Music Hall, bien qu'entré dans les annales, est vraiment d’une rare bêtise) avec sa litanie de personnages féminins d’une pâleur et d’une vulgarité sans nom. Il faut voir la femme de Jo le Suédois lors de sa première apparition, un aspirateur à la main, son fils dans les bras, décrochant le téléphone pendant que Jo lit le journal allongé dans son sofa. Crispant.
Et pourtant…
50 ans plus tard, le film emporte tout sur son passage, même ses plus évidents défauts, et une fois le générique de fin déroulé, hante les esprits avec une rare prégnance. Sûrement parce que l’on retrouvera plus tard de l’ADN certifié Rififi chez Melville (le Doulos, Bob le Flambeur), Tarantino (Reservoir Dogs), John Woo, Ringo Lam, Michael Mann, David Mamet, tous ces cinéastes qui se seront frottés au film de cambriolage dans leur carrière. Avec comme phare, Du Rififi chez les Hommes. Car ne nous y trompons pas : si le film est encore aujourd’hui aussi marquant, c’est surtout pour son incroyable séquence de cambriolage, référence en la matière, et mètre-étalon du genre.
Véritable tour de force cinématographique, cette demi-heure tout bonnement géniale révèle un cinéaste maître de ses effets à l’extrême, jouant sur les nerfs du spectateur à la manière du meilleur Hitchcock et s’autorisant quelques effets d’une audace folle. Pendant 35 minutes éblouissantes, Dassin va ainsi supprimer tout dialogue, effacer toute trace de musique et retourner avec délectation aux sources du cinéma, quand il était encore muet et que les seules armes d’un cinéaste étaient un cadre, ses acteurs et le montage. Pari gagné : la séquence est inoubliable, inégalable et inégalée. De ces scènes qui vous donnent envie de vous plonger dans la documentation de votre lecteur DVD pour enfin apprendre à programmer une suite de chapitres à regarder en boucle.
Pour ces fabuleuses 35 minutes, il sera alors beaucoup pardonné au film : son dernier quart un peu faible au regard de cette incroyable séquence, son jeu d’acteurs inégal (malgré un immense Jean Servais, force est de reconnaître que le pauvre Carl Möhner n’est par exemple vraiment pas à la hauteur), sa postsynchronisation parfois hasardeuse ou encore les clichés du scénario. Film inégal donc, sûrement un peu étouffé par ce majestueux morceau de bravoure, et qui pourtant, cache quelques autres trésors pour qui veut bien y regarder d’un peu plus près.
Car ne s’attarder que sur cette fameuse séquence, ce serait aussi oublier l’extraordinaire travail d’Alexandre Trauner sur les décors, la très belle partition musicale de George Auric, la gouaille toute parisienne des dialogues ou encore la première apparition, assez convaincante, d’un jeune Robert Hossein. Enfin, ce serait faire injure au talent de Jules Dassin, son sens du cadre, son efficacité toute "américaine" et surtout ses petites innovations discrètes, qui mine de rien annonçaient la Nouvelle Vague avec cinq ans d’avance. Dans une dernière séquence de toute beauté, la caméra et les ciseaux de Dassin, libres comme l’air, s’autorisent quelques embardées folles dans les rues de Paris qui n’auront rien à envier au Godard d’A Bout de Souffle… Et ce en 1955. C’est dire si malgré ses quelques défauts, Du Rififi pour les Hommes est de ces films que l’on chérit secrètement.
LE DVD /
Image : Criterion oblige, le film nous est offert sur une superbe copie, aux contrastes purs, aux noirs profonds et bien définis. On pourra toutefois reprocher un certain grain sur quelques scènes ainsi que quelques discrets points blancs et rayures vers la fin du film (1'45"43) mais ce ne sont que d’infimes reproches envers l’éditeur américain qui fait encore ici preuve de sa légendaire méticulosité, quasi maniaque (comment appeler cela autrement, quand la jaquette annonce fièrement la suppression de 23 235 salissures de la copie ?) A noter, un changement de couche très discret
Son : La piste son a elle aussi eu droit à un toilettage de premier choix, qui nous offre un son clair et un mono d’une propreté irréprochable. Du très très bon travail, façon Criterion. A noter pour les curieux (et les anglophiles) que le film est aussi proposé en version anglaise doublée, avec des voix bien choisies. Bien sûr, le sous titrage anglais est optionnel…
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Fiche technique
- Titre : Du rififi chez les hommes
- Titre anglais : Rififi
- Réalisation : Jules Dassin (premier film tourné en France par le réalisateur qui fuyait le maccarthysme)
- Scénario : Jules Dassin, René Wheeler et Auguste Le Breton, d'après le roman d'Auguste Le Breton aux éditions Gallimard
- Dialogue : Auguste Le Breton
- Assistant réalisateur : Patrice Dally, Jean-Jacques Vierne, Bernard Deflandre
- Production : Indus Films, Pathé Cinéma, Prima Films
- Directeur de production : René Gaston Vuattoux
- Chef de production : Henri Bérard
- Producteurs délégués : Henri Bérard, Pierre Cabaud, René Bézard
- Musique : Georges Auric et Philippe-Gérard
- Direction musicale : Jacques Météhen
- Images : Philippe Agostini, assisté de André Domage et Raymond Lemoigne
- Opérateur : Jean-Marie Maillols, assisté de André Domage, Lemoigne et Chenglesy
- Montage : Roger Dwyre, assisté de Nadine Marquand et Denise de Casabianca
- Tournage du 22 septembre au 21 décembre 1954
- Décors : Auguste Capelier, Alexandre Trauner, Robert André et Gabriel Paris
- Costumes : Robes dessinées par Rosine Delamare et exécutées par Marcelle Desvignes
- Habilleuse : Henriette Ricard
- Son : Jacques Lebreton
- Recorder : Jean Philippe
- Perchman : Charles Akerman
- Maquillage : Anatole Paris, assisté de Marcelle Testard
- Tapissier : Roger Fresca
- Photographe de plateau : Raymond Bègue
- Script-girl : Renée Nitschke
- Régisseur général : Louis Manella, assisté de Jean Goiran
- Régisseur extérieur : Pierre Charron, assisté de Kougoucheff
- Accessoiriste : Maurice Terrasse et Charpeau
- Administrateur général : Wilhelmine Bérard
- Les joyaux sont de la maison Dusausoy (Paris)
- Les fourrures de chez Renel
- Distribution : Pathé Consortium Cinéma
- Pays d'origine : France
- Enregistrement sonore Western Electric Simo
- Tirage : Laboratoire Franay L.T.C Saint-Cloud
- Trucage : Lax
- Format : Noir et blanc — 1,37:1 — Monophonique — 35 mm
- Genre : Film noir, policier
- Durée : 114 minutes
- Dates de sortie : 13 avril 1955 (France), 13 juillet 1999 (re-sortie France)
- Visa d'exploitation : 16012
Distribution
- Jean Servais : Tony le Stéphanois, ex-caïd, sorti de prison
- Carl Möhner : Jo le Suédois, un complice de Tony
- Robert Manuel : Mario Ferrati, un complice de Tony
- Jules Dassin : Cesar le Milanais (crédité sous le pseudonyme de Perlo Vita)
- Marie Sabouret : Mado les Grands Bras, ex amie de Tony
- Janine Darcey : Louise, la femme de Jo
- Magali Noël : Viviane, la chanteuse
- Claude Sylvain : Ida Ferrati, la femme de Mario
- Marcel Lupovici : Pierre Grutter
- Pierre Grasset : Louis Grutter dit Louis le Tatoué
- Robert Hossein : Rémy Grutter, le frère de Pierre
- Dominique Maurin : Tonio, le fils de Jo et Louise
- Teddy Bilis : Teddy Levantin
- André Dalibert : Un client à la "Cage d'Or"
- Marcel Lesieur : Frédo, le bistrot
- Marcelle Hainia : Suzanne, la femme de Frédo
- Emile Genevois : Charlie, le fournisseur de "cam"
- Alain Bouvette : le portier de "La Cage d'Or"
- Fernand Sardou : un truand joueur de cartes
- Maryse Paillet : La mère de Charlie
- Armandel : Un autre joueur de cartes
- René Hell : Le vendeur de journaux
- Moustache : Le batteur de l'orchestre
- Jean Bellanger : Un journaliste
- Jenny Doria
- René Hell
- Daniel Mendaille : Le vigile
- Huguette Montréal
- Lita Recio
- Alice Garan
- Jacques David
- Marcel Rouzé : Le premier agent
- Gilbert Moreau
- Le tournage s'est déroulé à Paris (Rue du Louvre, Rue Pigalle ...), Saint-Rémy-lès-Chevreuse, ainsi qu'aux studios Photosonor, à Courbevoie.
- La chanson Le Rififi fut écrite et composée par Jacques Larue et Philippe-Gérard et interprétée par Magali Noël aux éditions Les Auteurs Associés.
- Prix du meilleur réalisateur et nomination à la Palme d'or, lors du Festival de Cannes 1955.
- Prix Méliès en 1955
- Prix du meilleur film lors du Syndicat français des critiques de cinéma 1956.
critique express
Le film. L'un des meilleurs polars de l'histoire du monde du cinéma. Tourné en France par Jules Dassin, qui fuyait les Etats-Unis du maccarthysme et qui, après quatre ans de galère, réussit le film parfait en mêlant savamment la mythologie américaine du genre et le réalisme à la française. Du rififi chez les hommes est l'adaptation d'un roman d'Albert Simonin par l'auteur lui-même, et suit Tony le Stéphanois, truand usé et désabusé qui replonge dans le crime après cinq ans de taule. Jules Dassin y apporte son pessimisme et son sens de l'atmosphère. On est encore émerveillé par la séquence de vingt minutes du cambriolage, sans un mot, sans une note. Une leçon de mise en scène. Un chef-d'oeuvre.
http://www.youtube.com/watch?v=HMp4WTBdKKg
http://www.youtube.com/watch?v=YuH6W1l_XuI&feature=PlayList&p=4226F0FD59A3149B&index=0
http://www.youtube.com/watch?v=vCZVMoYk9M0&feature=PlayList&p=4226F0FD59A3149B&index=1
http://www.youtube.com/watch?v=5BgCniarwKw&feature=PlayList&p=4226F0FD59A3149B&index=2
http://www.youtube.com/watch?v=lhwAbduufFI&feature=PlayList&p=4226F0FD59A3149B&index=3
etcetc....
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